Quand l’Europe et l’Afrique se rejoignent et se mélangent…

Larrache, Martil, Ceuta

 

Le temps passant, nous devons ressortir notre véhicule du Maroc puisque son certificat d’importation temporaire expire prochainement. Il est réparé et repeint ! Nous prenons donc la route en direction du nord avec comme idée de passer quelques jours en terres marocaines, puis de sortir en Espagne pour y faire un court séjour andalou. Le véhicule sera réacheminé vers la France, tandis que nous reprendrons l’avion pour Rabat depuis Malaga.

 

Même si nous savons que l’Espagne a été très présente au nord du Maroc depuis le 15ème siècle, puis sous le Protectorat de 1912 à 1956, nous (re)découvrons « en direct » son influence palpable et le brassage de populations et de cultures qui caractérise cette région du globe. A notre grande surprise, à 200 kms à la ronde de Tanger, on ne vit pas du tout, du tout de la même façon, l’Europe et l’Afrique se mêlant jusqu’au point de brouiller tous les repères.

 

Le Maroc espagnol …

 

Le nord du Maroc, plus européanisé que le sud, attire assez peu les touristes. A tort à mon avis car il recèle de perles méconnues qui méritent le détour (voir mon article sur Tanger et Assilah et celui sur Tétouan). Je ne pensais pas trouver à Larrache une ville à la fois aussi typiquement marocaine et, paradoxalement, aussi espagnole. Située à une centaine de kms au sud de Tanger, elle nous a offert une superbe halte loin des hordes du tourisme de masse.

 

Construite à flanc de colline, nous l’approchons par le bas de sa médina, en nous garant devant le port de pêche. Nous sommes en plein Ramadan et il n’est pas question de trouver un resto ou un snack ouvert ! Dommage car les poissons frais feraient fureur sur une plancha ou un grill !

 

D’emblée, nous sommes saisis par la beauté du lieu et … son caractère décrépi ! La médina trône fièrement au-dessus de nous, mais on dirait que ses murs ne tiennent plus que par la grâce d’Allah.

 

 

Pas effrayés, nous gravissons la volée de marches qui longe son fort en ruine. 

 

Puis, nous débouchons dans des petites ruelles moyenâgeuses. L’effet est saisissant et on se croirait au fin fond du Maroc. 

 

 

 

Ces ruelles nous conduisent sur une superbe de place de marché, bordée d’arcades bleues.

 

 

 

C’est un vrai souk où les marchands de fruits et légumes jouent des coudes avec les vendeurs de sardines, à proximité de vendeurs de téléphones ou de quincailleries. On adore !

 

 

 

 

Mais, à une rue derrière, l’ambiance change totalement en débouchant dans un ancien quartier espagnol du protectorat. La place de la Libération, bordée d’immeubles art-décos blancs paraît un peu surannée… On dirait qu’après 44 d’occupation, les espagnols se sont retirés sur la pointe des pieds, abandonnant leurs édifices aux habitants originaires de la ville … Ici le Maroc a gagné.

 

 

Place de la Libération

 

 

Seule l’église catholique paraît encore défier toutes les mosquées du coin !

 

 

 

 

Nous arpentons longuement les rues de cette cité fondée il y a longtemps par les phéniciens et désormais aux confluences de plusieurs cultures. Dommage que nous soyons pendant le Ramadan car tout semble fonctionner au ralenti et les rues sont un peu vides.

 

 

 

Après une nuit à Assilah, déjà visitée, nous prenons la direction de l’Est. Nous devons rejoindre des amis Suisses auprès d’un lac, au nord de Tétouan. C’est bonne pioche ! Calé au bord des montagnes du Rif, il offre un panorama totalement inattendu dans un pays principalement aride !

 

Je vous partage quelques photos car l’endroit était sublime et très dépaysant, loin des bleus de l’Océan Atlantique et de la Méditerranée. 

 

 

 

Après avoir devisé longuement sur le voyage et l’instruction en famille, nous nous endormons au son des grenouilles et nous réveillons aux aboiements des meutes de chiens … Comme souvent au Maroc.

 

 

 

 

Le lendemain, nous passons la journée en bord de Méditerranée à Martil. Station balnéaire propre et soignée, elle pourrait être espagnole si on se bornait à regarder certains de ses monuments …

 

 

 

 

Néanmoins, elle reste profondément marocaine, comme en atteste le respect scrupuleux du Ramadan par ses habitants. Carlito va en faire les frais hihi. Il est 18H15 quand celui-ci se déclare à 2 doigts de mourir de faim. Il faut le comprendre, il n’a pas mangé depuis au-moins 3 heures, quand les Marocains jeunent depuis l’aube ! Un resto est ouvert et propose un menu « rupture du jeûne » (Ftour). Plein de gens sont déjà attablés devant des mets posés sur leur table, mais aucun ne mange, attendant patiemment.  Nous nous asseyons également, indiquant à notre affamé que nous ne pourrons commencer à manger que lorsque le moment sera venu. Il reste encore 30 minutes environ. Et là commence la demi-heure la plus longue de la vie de mon fils qui se met à baver devant ses victuailles, sans avoir le droit d’y toucher hihi. Un supplice. Inutile de vous dire que tous ses sens sont aux abois : la vue pour observer quand les autres clients commenceront à manger, l’ouïe pour guetter le chant libérateur du muezzin, l’odorat pour humer les fumets sortant des cuisines … A 18H49, la mosquée au loin délivre tout le monde et chacun se rue sur son assiette. Carlito fait donc de même, tout comme nous satisfaits mais étonnés par une expérience que nous aurions pensé plus spirituelle de la part des musulmans et moins gloutonne. Mais bon, nécessité fait sûrement raison !

 

 

Affamé

 

 

L’Espagne marocaine

 

Le lendemain, nous prenons la direction de l’enclave espagnole de Ceuta.

 

C’est la troisième fois en 8 mois que nous y venons. Cette fois-ci l’idée est d’y prendre le ferry avec le véhicule pour regagner l’Espagne.

 

En ce lundi matin, le passage en douane est expédié pour nous tous en quelques minutes. Les douaniers marocains fouillent un peu le van pour voir si nous ne planquons pas un clandestin, tandis qu’un de leurs chiens vérifie  que ne nous ne trimballons pas de hashish du Rif. La petite claque dans nos museaux nous la prenons avec le décalage horaire qui nous contraints à avancer nos montres de deux heures. Il n’est donc plus midi comme au Maroc, mais 14 heures comme en Espagne.

 

 

 

 

Nous partons au port acheter nos billets : le ferry de 19H30 propose les meilleurs tarifs et nous nous en sortons pour 155 euros de traversée pour nous 3 et le véhicule. Nous faisons aussi le plein : le diesel est à 1.35 euros le litre.

 

Comme nous avons du temps devant nous, nous finissons de visiter ce que nous ne connaissions pas encore à Ceuta. D’abord, son supermarché LIDL hihi : ça fait très longtemps que nous ne sommes pas allés dans un supermarché européen. Vous allez rire, mais nous sommes impressionnés par l’abondance de produits qu’on y trouve. Non pas que les supermercados marocains soient mal achalandés, mais qu’on trouve ici des produits qu’on n’avait pas vus depuis longtemps : de la charcuterie partout et… un immense rayon de vins et de bières. Les deux sont introuvables en accès libre au Maroc, tout comme ils l’étaient aussi aux USA. Carlito hallucine😁.

 

Une bouteille de vin pailletée 😁

 

Après nos emplettes, nous faisons le tour de l’enclave en véhicule. J’aime bien cet endroit insolite qu’est Ceuta. Vous ne le savez peut-être pas, mais l’Espagne possède 7 enclaves au Maroc, 5 îlots non habitées ou de garnison et Ceuta et Melila qui sont statutairement des villes autonomes. Elles appartiennent à cette dernière depuis le 15ème siècle et ne sont pas considérées par le Comité spécial de décolonisation de l’ONU comme des « territoires non autonomes en attente de décolonisation » (au contraire de Gibraltar). Bien que le Maroc revendique ces territoires depuis la décolonisation, l’Espagne tient bon arguant qu’ils « sont devenus espagnols bien avant que le Maroc ne devienne un Etat (et qu’ils ne peuvent pas être considérés) comme des colonies car ils sont parfaitement intégrés en tant qu’entités autonomes dans la Constitution espagnole ». J’imagine que conserver l’une des portes d’entrée vers la Méditerranée (et l’Afrique également) est aussi de première importance pour l’Espagne qui a perdu Gibraltar en 1704.

 

Nous voici donc entrain de visiter les murailles royales en plein centre-ville. Construites à des fins défensives d’abord en 962, puis au 18ème siècle, elles sont séparées par le fossé San Felipe, dont la couleur bleue est très attrayante !

 

 

 

 

Dans le centre-ville les églises et les Vierges trônent aussi fièrement que les mosquées de l’autre côté du « mur ». L’ambiance espagnole est totale, tandis qu’un peu plus loin dans l’enclave, les quartiers pauvres abritent une population marocaine espagnole. On dit que la cohabitation entre les populations se fait de façon pacifique, même s’il existe ici très peu de couples mixtes.

 

 

 

 

Puis, nous prenons la route en direction du fort del Desnarigado qui surplombe l’enclave… D’ici la vue sur le Maroc est sublime.

 

 

 

 

Au pied des « Colonnes d’Hercule », une statue symbolisant le mythe antique selon lequel Hercule aurait ici séparé l’Europe de l’Afrique, l’Atlantique de la Méditerranée, nous apercevons au loin le rocher de Gibraltar (qui est une des colonnes d’Hercule, l’autre côté marocain étant le mont Abyle – Djebel Musa)

 

 

 

 

La mer est agitée. Très agitée ! ça tombe bien car nous n’allons pas tarder à embarquer hihi.

 

 

 

C’est le soir de l’éclipse solaire, mais nous savons que nous sommes trop loin du continent américain pour l’apercevoir correctement. Les nuages ne nous laissent de toute façon aucune chance.

 

 

Pour autant les jeux de soleil sur le Détroit de Gibraltar sont sublimes.

 

 

Nous frôlons Gibraltar

 

 

 

 

1H15 après notre départ de Ceuta, nous sommes à Algéciras en Espagne.

 

Irons nous visiter Gibraltar ?

Gibraltar, tout le monde en a entendu parler, of course, mais qui a pris un jour la peine de s’y arrêter ? En général ce sont les touristes de croisières qui y font une brève halte histoire de monter au sommet de son célèbre rocher. Mais les autres …

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.