Calais, Lubec, Weast Coddy Head Lighthouse, Lincolnville, Camden, Rockland, Wiscasset, Bath, Portland
En l’été de grâce 2023, toute la planète Terre est écrasée sous une canicule accablante et dévorée par des incendies épouvantables réduisant en cendres ce que l’astre solaire n’avait pas encore calciné. Les populations, agonisant sous des températures extrêmes, se calfeutrent comme elles le peuvent dans des demeures devenues des fours invivables.
Toute la planète Terre ?! Oui, à en croire les infos françaises toujours bien renseignées. Et surtout les Etats-Unis, pays damné par le grand Satan et ses enfers brûlantes.
Tous, tous les Etats-Unis ?! Oui … mais non !!! Dans le nord-est du pays, aux confins du Canada et dans une partie de ce qui fût jadis la Nouvelle-Angleterre, un courageux petit Etat résiste : le Maine.
Tandis que tout le monde succombe, il y fait 20 degrés au meilleur de la journée, pluie et brouillard inclus.
D’ailleurs, le Maine, à première vue, ça ressemble à ça :
Tout avait pourtant débuté sous les meilleurs auspices !!!
Retour aux USA sous un grand soleil !
Depuis la côte du New-Brunswick, passer la frontière à la petite douane de Calais s’impose. On dirait que le nom de la ville est prédestiné : pour aller en (Nouvelle) Angleterre, si tu es migrant, tu passes par Calais !
Notre idée n’est cependant pas de nous planquer sous un camion de marchandises pour entrer illégalement dans le pays suivant, mais bel et bien d’aller visiter la côte du Maine dont on nous a dit le plus grand bien.
Cependant, ça débute mal. Au moment où nous accédons au poste frontière, le douanier nous annonce qu’il ne nous reste que 9 jours de visa touristique aux US sur l’année 2023 et que nous serons ensuite des migrants illégaux si nous ne ressortons pas en temps et en heure. Punaise ! Notre mois au Canada n’a pas été décompté de notre ESTA américain… 9 jours, c’est trop peu pour nous organiser et je n’ai pas du tout envie de plaisanter avec les services migratoires du pays. Voyant notre mine déconfite – miracle – le gars nous escorte gentiment aux services migratoires et plaide notre cause pour que nous puissions obtenir 3 mois d’ESTA supplémentaires. Miracle bis, l’agent migratoire est d’une humeur joviale (et insolite dans ce genre de bureau-normalement-bien-casse-pied) et nous accorde sans aucune question 3 mois de plus dans son pays. Ouf !!! Nous ressortons hilares car le gars était, en plus, vraiment drôle.
Où aller maintenant ? Le Maine (vous allez voir la comparaison de la mort qui tue) c’est un peu comme un intestin : c’est tout petit en apparence (39ème plus petit Etat des US), mais si tu devais déplier son littoral très découpé, tu obtiendrais 4500 miles de côtes !
Nous allons donc le visiter progressivement en longeant le littoral.
Premier arrêt, le site historique de l’île de Sainte Croix. C’est à cet endroit que la première tentative française de coloniser de façon permanente le territoire nord-américain eut lieu. L’île de Sainte-Croix fût concrètement l’un des premiers établissements européens en Amérique du Nord (1604) et permit ensuite la colonisation du vaste territoire connu sous le nom d’Acadie. Quand les français y débarquent, la région est alors peuplée de peuples premiers avec qui les européens ont déjà commercé. L’expédition est tout autant motivée par la volonté de s’approprier un territoire que par celle de faire fortune en important en France les fourrures de castors que vendent les autochtones (ou échangent contre des produits européens appréciés).
Cependant, l’expédition envoyée de France et comportant 79 hommes est décimée par le froid et le scorbut à l’hiver 1604-1605, obligeant ses deux dirigeants, Pierre Dugua et Samuel de Champlain, à transférer leur établissement sur la terre ferme en 1605.
En 1608, Samuel de Champlain quitte cette première colonie pour aller en établir une autre plus au nord : elle deviendra la ville de Québec.
Après ce passionnant arrêt, profitant d’un soleil bien mérité, nous poussons jusqu’au petit village côtier de Lubec.
Ses activités principales sont orientées vers la pêche et les salaisons de poissons.
Mais Lubec est surtout connu pour son phare pittoresque :
Sur une côte en granit :
Nous nous couchons à proximité du sémaphore, satisfaits par la beauté des lieux et la météo enfin clémente.
Deux jours à Acadia National Park
A nous l’été !!! Le 13 juillet, c’est un minimum que de pouvoir sortir shorts et débardeurs !
Nous filons au parc national d’Acadia connu pour ses côtes en granit rose, ses lacs et ses forêts. C’est le seul parc national du nord-est des US, nous n’allons donc pas le rater !
Petit ravitaillement essence dans une station service d’un autre temps et nous arrivons dans la partie la plus excentrée de ce parc (Schoodic Peninsula) en milieu d’aprem.
Curieusement, les contours du paysage se font un peu flous, mais nous n’y prêtons pas vraiment attention :
C’est en ressortant du parc que le brouillard s’abat vraiment sur nous ! Pas grave, ça ira mieux demain, pensons-nous !
Mouaf ! Mouaf ! Mouaf ! Au réveil, c’est pire. Restant optimistes, nous nous dirigeons quand même vers l’autre partie du parc national d’Acadia pour vraiment le visiter.
Astucieusement, il propose des navettes gratuites de bus pour le parcourir et éviter les embouteillages en son sein. Parfait ! Emportant notre repas froid, nous prenons le bus.
Premier arrêt à la plage. L’avantage du brouillard est que nul ne peut se rendre compte des imperfections de mon body summer hihi. D’ailleurs, un gamin m’appelle maman sans se rendre compte que je ne suis pas sa mère.
Bueno … Avant d’égarer notre propre lardon dans la brume, nous poursuivons sur la côte en parcourant le Ocean path Trail, sentier côtier. On vit une expérience intéressante, montrant que ça ne doit vraiment être facile d’être aveugle…
Soudain, une percée de lumière ! Tels des insectes imbéciles, nous fonçons sur les rochers en profiter !
L’ambiance est fantasmagorique…
Puis, nous arrivons au Thunder Holl, un trou dans un rocher où la mer s’engouffre avec un bruit fracassant.
L’un de nous 3 commence à s’impatienter. Pour se calmer, il tente de déplacer des rochers hihi (l’âge bête, sûrement) :
Nous reprenons le bus en direction du lac de Jordan Pond. Ô joie, le brouillard s’est un peu dissipé.
C’est joli, mais on a vu mieux ailleurs. Chouinou, qui ne lâche rien ce jour-là, nous le fait remarquer âprement. Il veut rentrer. De fait, il n’a pas tout à fait tort. On pourrait encore faire une rando dans les bois, mais comme le Maine est le haut lieu de la maladie de Lyme aux US, nous rentrons au van en milieu d’aprem. Un peu déçus par ce parc qui doit vraiment être splendide avec des couleurs automnales, mais est assez sinistre sous le brouillard.
Pour se remettre, nous décrétons une soirée homard. En effet, le homard est l’emblème du Maine et son poumon économique. Même les plaques d’immat’ le célèbrent.
A l’époque coloniale, ils étaient si abondants qu’ils étaient considérés comme de la nourriture pour les pauvres (je vous rassure, ce n’est plus le cas ^^, hélas …). C’est à partir de 1850 que la pêche au casier a débuté et que le Maine s’est imposé comme le principal producteur de homards aux USA.
Les routes sont bordées de vendeurs et nous stoppons chez l’un d’eux.
Tu choisis ton homard qui est précipité dans une énorme cuve d’eau bouillante et tu l’emportes comme s’il s’agissait d’un big-mac de chez Mc Do !
Par solidarité avec mon repas, j’opte pour un teint « homard trop cuit », histoire de déguster ce dernier avec une meilleure conscience :
Il est délicieux !
Enfonçons-nous encore un peu plus dans le brouillard si cela est possible !
Malgré le climat, le Maine nous plaît énormément. Cette atmosphère brumeuse n’est pas désagréable à vivre, elle nous fait découvrir des sensations que nous ne connaissions pas.
Au matin, nous mettons le cap sur la petite ville de Ellsworth. Ce sera un arrêt bibliothèque, le temps ne permettant pas vraiment d’apprécier le paysage hihi. J’adore car, dans le Maine, ce sont souvent des demeures historiques qui ont été réhabilitées en bibliothèques :
L’hôtel de ville et une boutique :
Nous dormons sur le quai de pêcheurs de la petite ville de Searsport. Tout ce soleil, c’est pénible à la fin !!!
Mais quand nous ouvrons les yeux le lendemain, une jolie surprise nous attend ! Le brouillard a disparu, remplacé par une pluie battante ! Punaise, le gars qui oserait alors me parler de sécheresse et de canicule sur « tous les Etats-Unis », prendrait mon poing dans la figure !
C’est pas grave, nous sommes malgré tout enchantés par ce que nous visitons car toutes les maisons du Maine sont vraiment très jolies et typiques. Même sous la pluie. Ça nous change agréablement des petites villes pourries du centre-ouest américain. Ici les jardins ne sont pas encombrés de vieilles bagnoles rouillées et de caravanes à l’abandon, mais sont fleuris et soigneusement entretenus☺️
Lincolnville :
La tenue homard me va assez bien, j’en conviens :
Camden :
La ville de Camden nous séduit particulièrement. Elle est baptisée la perle de la côte et a abrité pas mal de célébrités contemporaines ou non, dont Charles Dickens.
Son joli port attire particulièrement l’attention :
Tout comme ses vieux voiliers :
Son centre-ville en maisons de briques ou de bois est charmant :
Il y a de nombreuses boutiques touristiques :
Des pubs aussi, of course :
Et des fleurs, beaucoup de fleurs !
Pourtant, c’est à Rockland où un festival de blues est organisé, que nous finissons la journée :
Il n’aura presque pas cessé de pleuvoir de la journée et le soir venu la pluie redouble encore d’intensité … Pfffff ….
Le lendemain matin, par brouillard, nous visitons le phare de Rockland, plus loin sur la péninsule. Un très joli petit port nous y accueille.
Mais, c’est en nous rendant au phare que nous égarons Carlito… N’écoutant que rarement les indications qu’on lui donne, il s’est perdu en venant à notre rencontre. Quand nous le retrouvons enfin, nous lui posons la question essentielle : « qu’aurais-tu fait si tu ne nous avais pas retrouvés ? ». Et là, sa réponse manque de nous faire mourir de rire : « je serais allé … chez Walmart » ! Mouhaha ! Chez Walmart ! On a dormi si souvent sur les parkings de la chaîne qu’il a assimilé les magasins à sa maison ! Pour lui c’est une évidence : il sait qu’il y trouvera de l’eau et de la nourriture, des toilettes et internet, mais aussi un toit et des gens à qui exposer son problème. Nous sommes morts de rire ! Disons que ses réflexes de survie ne sont pas dénués de tout bon sens hihi
En attendant on part visiter le phare !
Une certaine obsession pour le homard …
Le moins que l’on puisse dire avec tout cela c’est que nous ne sommes pas ici submergés par le tourisme de masse même en plein mois de juillet hihi
Il demeure une interrogation : le Maine est-il autre chose qu’un immense banc de brouillard ? Les locaux sont formels : non. Le brouillard est au Maine ce que la neige est au Québec (même si, en plus il fait très froid l’hiver dans cet Etat !), le bruit à la Colombie et le camembert à la Normandie. Bueno … on va donc s’accommoder et apprécier d’autant plus les quelques plages de beau temps.
Et ça tombe bien, ce après-midi là, pour une fois, le soleil est de la partie. Punaise, on a presque chaud tant le climat est en plus humide !
Nous stoppons au hasard à Wiscasset, un pueblo avec plein de maisons historiques où un snack de coin de rues retient notre attention, bien qu’il soit fermé.
A voir le nombre de célébrités qui y ont dégusté un roll au homard, nous comprenons que c’est un endroit à prendre au sérieux hihi.
Ouvert depuis 1938, il est multi-primé et récompensé pour la qualité de sa nourriture homardesque. Pas de chance, nous le découvrons le jour de sa fermeture hebdomadaire …
Dans un registre comparable, nous passons ensuite la ville de Bath et son restaurant un peu outrancier hiih
Si t’as pas compris que tu es au pays du homard, c’est que tu es vraiment bouché !
Le lendemain, nous arrivons dans la plus touristique ville de Portland.
C’est pourtant, avant tout, un port de pêche :
Aprenter ses vieux entrepôts nous enchante :
Il y a un très beau phare à Portland, mais personne d’autre que moi ne veut s’y rendre… Il paraît que trop de phares tue les phares hihi …
C’est pas bientôt fini le Maine ?!
Le soir arrivant, nous décidons de passer la nuit à Saco, petite ville traversée par la rivière du même nom.
En s’approchant de celle-ci, nous constatons que beaucoup de gens s’amassent sur un pont pour la regarder couler. Elle doit probablement charrier des tonnes de homards ?! En fait, c’est autre chose : elle est juste totalement déchaînée.
Il a fait tellement mauvais en amont de celle-ci ces derniers jours qu’elle est en crue… C’est impressionnant.
C’est une ville historique qui fut jadis protégée par le « Stone Fort« . Il fut érigé en 1693 pour défendre la population de la ville contre les attaques indiennes, suite notamment à l’incendie de son centre-ville en 1688 par des troupes d’autochtones soutenues par les canadiens français désireux de chasser les colonies anglaises nouvellement installées dans le Maine.
J’adore son ambiance nocturne.
Au matin, il ne nous reste plus que quelques kilomètres à parcourir pour entrer dans le Massachusetts. La côte devient alors beaucoup plus fréquentée par les touristes, la proximité avec Boston aidant.
Nous passons la journée à Salem, ville connue pour les procès en sorcellerie qui y eurent lieu en 1692. La ville semble désormais prospérée autour du mythe.
En route désormais pour Boston ! Il y a un temps pour tout, mais la côte du Maine restera notre coup de coeur de cette première moitié d’année ! Une destination inconnue (ou presque) des français, à recommander sans hésitation. Et si le climat vous effraie, la gentillesse de ses habitants le compense largement !
PS – j’ai monté rapidos les petites vidéos capturées ci et là dans le Maine. C’est pas de la vidéo pro, mais ça complète les photos 😁