Quel est le principal intérêt de vivre ou de voyager à l’étranger ?! C’est d’apprendre de la culture des autres, bien sûr !!!
Bien que nous pensions connaître beaucoup de celle du Maghreb en tant que Français, nous avons appris que tel n’était pas forcément le cas !
J’ai déjà eu l’occasion de faire état des différences culturelles que nous avons perçues en visitant ou en vivant sur le continent américain et ceux que cela amuse ou intéresse peuvent se référer à ma rubrique « Différences culturelles » qui est désormais bien étoffée.
Je vous partage maintenant ce que nous avons appris cette année en résidant au Maroc et que nous n’aurions pas pu deviner (ou presque) avant d’y séjourner au long cours !
Mes découvertes sont livrées sans aucun ordre d’importance, un peu en vrac, en fonction des situations rencontrées … Evidemment en toute bienveillance.
Et vous ? Combien de langues parlez vous ?
Août 2023 : notre avion se pose sur le tarmac de l’aéroport de Casablanca …
J’ai un petit doute … J’espère que les Marocains n’ont pas oublié la langue française car nous, on ne baragouine pas le moindre mot d’arabe… Dans la file menant au guichet des services migratoires, je tends l’oreille : punaise, c’est bizarre leur dialecte qui mélange plusieurs idiomes : ça sonne comme de l’arabe mais on y entend aussi des mots français, voire espagnol… Pas étonnant me dit mon mari, fin linguiste s’il en est : c’est de la Darija, l’arabe dialectal marocain qui ne s’écrit pas ! Ah bueno … ça ne va pas beaucoup nous aider, d’autant qu’on ne maîtrise pas non plus l’Amazighe (berbère) ni l’arabe classique, qui sont les 2 langues officielles du pays !
Je tends mon passeport au préposé et, avec mon plus beau sourire, tente un « bonjour monsieur ». Bingo ! L’officier me répond sans hésitation par un « bonjour madame, soyez la bienvenue ». Ouf ! Non seulement l’accueil est chaleureux, mais la langue française a toujours cours dans le pays (même si elle est en perte de vitesse assez importante) ! Respect donc pour nos amis Marocains qui, dans les grandes villes, maîtrisent notre langue, et parfois l’anglais ou l’espagnol. Ce n’est pas forcément le cas dans les campagnes, mais la plupart de leurs habitants communiquent quand même en Darija et en berbère. Je suis bluffée car, perso, je ne connais pas beaucoup de Français « de souche » qui puissent se vanter d’être polyglottes, même parmi les plus éduqués…
Le certificat de mariage…
Vous rappelez vous de la dernière fois que vous avez dû exhiber votre acte de mariage ?! Etait-ce pour votre divorce ?! Des funérailles ? Une situation officielle ou bien pourrie de la vie ? Ou … pour aller à l’hôtel ?
Nous voici dans le taxi qui nous conduit à notre premier AirBnB. Je vérifie l’adresse quand mes yeux sont attirés par une mention un peu étrange sur laquelle nous n’avions pas tilté : « acte de mariage obligatoire pour les couples ». Comment ça ?!!! C’est quoi cette histoire ?! Tu penses bien que ce n’est pas le genre de papier que j’ai en stock parmi ceux que je trimballe avec moi … Notre logeuse nous le demandera-t-elle vraiment ?
A l’arrivée celle-ci prend nos passeports et nous installe gentiment. Je finis par m’enhardir à lui poser la question. Mi-amusée, mi-sérieuse, celle-ci m’apprend alors que ce n’est pas vraiment obligatoire pour les étrangers visitant le Maroc, mais seulement pour les ressortissants marocains. De plus en plus étrange … Et pourquoi donc ?! Car c’est la loi ! En effet, dans un pays où l’Islam est religion d’Etat, l’article 490 du code pénal interdit les relations sexuelles hors mariage, en faisant un délit d’immoralité passible d’amendes ou de prison. Pour éviter que des couples « illégitimes » ou, pire, des prostituées ne louent des chambres d’hôtel ou des appartements, il est donc exigé un acte de mariage à l’entrée…
Quel contraste avec la Colombie où les hôtels (même ceux censés être « familiaux ») sont souvent des lieux pour faire la fête et dans lesquels tu as toujours des voisins de chambre mariés (ou pas) faisant un maximum de scandale pour que nul ne les ignore ! Pour le coup, le contraste culturel est saisissant .
Le karaoké qui réveille tout le monde, le demi- sommeil et moi
Cela étant dit, une autre demi-surprise nous attendait.
Tout juste arrivés de New-York au Maroc, et à cause du décalage horaire, nous sommes incapables de sortir avant midi d’un profond sommeil qui nous tombe dessus en milieu de nuit. Pendant plusieurs jours, un truc me perturbe : dans ce que je crois être la nuit profonde (mais en fait, c’est à l’aube) j’entends tous les jours un gars chanter en karaoké. Il chante tellement fort que ça doit réveiller tout le quartier, j’en suis sûre ! A moitié endormie et furieuse, je maudis ces colombiens qui vivent à proximité de chez nous et mettent la musique à fond pour emmerder leurs voisins ! La malédiction du bruit ne nous lâche pas !!
Il me faudra quelques jours pour réaliser que le chanteur présumé de karaoké n’est autre que le muezzin de la mosquée la plus proche et qu’il se contente de lancer un appel à la prière et non d’inviter les gens à faire la fête avec lui ou de partager ses talents de chanteur. Les colombiens m’ont vraiment traumatisée .
Depuis, nous cohabitons avec les appels à la prière qui ont lieu 5 fois par jour dans toutes les mosquées du Maroc. Et si certains muezzins chantent très mélodieusement, hélas tous n’ont pas un talent pour gagner « The voice ». Surtout dans les petits bleds …
L’art de rendre la vie facile !
Ces quelques différences culturelles avalées, nous nous familiarisons assez vite avec le Maroc. En effet, l’Afrique et l’Amérique latine possèdent des ressemblances assez frappantes dans un certain nombre de domaines. Parmi elles se trouve l’existence de plein de petits métiers disparus en Europe, mais qui rendent d’énormes services (moyennant pourboire ou rémunération, il va sans dire).
Par exemple :
- lorsque ma bouteille de gaz est vide, je ne me la coltine pas à bout de bras jusqu’à une station-service ou un supermarché vendant du gaz. Je descends dans ma rue chez le premier épicier venu qui me fait raccompagner jusque chez moi par quelqu’un qui vient me la changer. Ou alors, je demande au gardien de l’immeuble de s’en charger. Voire, carrément de faire mes courses en plus ;
- lorsque mes chaussures en cuir sont sales, je m’arrête en pleine rue chez un cireur de godasses ;
- Si ma voiture a besoin d’être nettoyée, c’est le « gardien de la rue » qui se chargera de la faire briller ;
- Quand j’ai besoin de faire le plein, il y a un gars à la station qui le fait pour moi ;
- Etc …
Pratique, non ?!
Et ça marche aussi pour les rendez-vous médicaux ?
Le concept de « vie facilitée » allait-il s’étendre jusqu’au domaine médical ?
Pour être franche avec vous, il y a quelque chose qui m’a beaucoup choquée en France lorsque nous y avons fait escale en 2023, c’est la difficulté à obtenir un rendez-vous médical. J’ai failli rester sans soins avec un abcès dentaire qui venait de se déclarer et c’est grâce à la pugnacité de ma famille à Saint Etienne, puis au hasard sur Doctolib dans le sud, que j’ai pu trouver une solution (provisoire). L’angoisse …
Quelques mois plus tard, me voici à Rabat. Une nouvelle rage de dents se déclenche un samedi soir et je passe mon dimanche à souffrir, un peu paniquée à l’idée de ne connaître ici aucun dentiste. Le lundi matin, à la première heure, je consulte donc mon ami Google pour qu’il m’indique un praticien si possible dans mon quartier, priant pour trouver un rendez-vous avant des jours. Un cabinet est spécialement bien noté par ses clients. Je m’y aventure et, à ma stupéfaction totale, j’obtiens une consultation pour le soir même ! J’y suis très professionnellement prise en charge et ressors soulagée.
Néanmoins, je dois aller voir un ORL pour confirmer que je n’ai pas un problème aux sinus. Truc de fou : on me donne un rendez-vous pour le surlendemain et j’enchaîne avec un scanner le jour suivant. Je n’en reviens pas hihi.
A peine remise de mes émotions, j’interroge des français installés de longue date ici et tous me confirment que dans les grandes villes marocaines (hélas c’est différent dans les campagnes mais je crois que c’est pareil en France), obtenir une consultation rapide est la norme.
Le plus intriguant a été le jour où Jérôme a voulu prendre rendez-vous chez un généraliste pour se faire prescrire une prise de sang : le médecin est venu directement chez nous faire une consultation à domicile ! Je ne sais même pas si cela existe encore en France hihi
Sens de l’accueil et grands moments de solitude
Il y a un point sur lequel je voudrais m’étendre un peu, c’est le sens de l’accueil. Car, les Marocains ont un contact facile, poli et chaleureux qui te fait te sentir bien immédiatement. C’est un trait de société qu’on a souvent retrouvé en Amérique latine, mais plus rarement aux USA ou en Europe : pouvoir engager facilement la conversation, être invités par des quasi- inconnus, baigner dans une ambiance conviviale, entendre à chaque coin de rue « soyez les bienvenus » …
Je me demandais si un Marocain visitant la France pourrait entendre de notre part un « soyez les bienvenus » hihi ? La réponse m’a incidemment été donnée par mon jeune dentiste. Alors que je l’interrogeais sur les pays d’Europe qu’il avait aimé visiter, il m’a répondu – un peu gêné – « tous sauf la France et l’Allemagne », ajoutant « en France, quand tu t’approches de quelqu’un, il se place généralement sur la défensive car il a peur d’être agressé et coupe court à toute forme de conversation… ». Grand moment de solitude sur mon fauteuil 😬…
Quels sont les animaux préférés des Marocains ?
Cela étant dit, abordons un autre thème, celui des animaux.
A voir leur état général dans le pays, on pourrait penser que beaucoup de Marocains ne leur prêtent aucune attention. Ce qui est en partie vraie, mais heureusement en partie faux.
Une chose est sûre, c’est qu’il ne fait pas bon s’incarner en âne ou en chien au Maroc. Un peu comme au Mexique, d’ailleurs.
En revanche, naître chat à Rabat , semble procurer ipso facto un statut de semi divinité . Gras ou maigrichons, sains ou pouilleux, jeunes ou vieux, ils jouissent en effet d’une espèce de privilège leur accordant 1°) le droit de pulluler 2°) de réduire en esclavage nombre de bonnes âmes humaines charitables qui les nourrissent et les choient à chaque coin de rue, amassant croquettes et petites gamelles d’eau pour qu’ils ne manquent de rien.
J’aurais donc été à 2 doigts de conclure que le félin est l’animal préféré des Marocains si mon attention n’avait pas été attirée par les nombreux gazouillis d’oiseaux que l’on entend partout. Et là, surprise, ce ne sont pas les corneilles, moineaux ou pigeons qui vivent dans les arbres, mais bel et bien plein de petits piafs en cage que les gens conservent chez eux ou sur leur balcon, renforçant éventuellement leurs chants par le bruit de leur sonnette d’entrée « piaillements d’oiseaux » !
Mais cette popularité des félins et des volatiles n’est finalement rien à côté de celle de … la vache ! Vous allez comprendre pourquoi ci-dessous …
Les aliments piliers de la cuisine marocaine
Un peu comme tout le monde, je pensais que la base de l’alimentation locale tournait autour des oignons, des tomates, d’autres fruits et légumes méditerranéens, de la viande de mouton, des olives, de l’huile d’olive, des laitages et des aliments à base de blé, dont la fameuse semoule…
Si tel est bien le cas, il n’en demeure pas moins qu’un autre animal/aliment est ici particulièrement populaire, comme je viens de le mentionner ci-dessus : la vache ! Pas le bœuf, hein ! La vache !
J’ai d’ailleurs réussi à en capturer une photo :
Eh ouais ! Sans elle, tout s’effondrerait ici ! On la retrouve partout (avec tous ses homologues), elle nourrit les humains, les adultes, les enfants, les bébés, elle nourrit les chats … Elle est entreposée dans toutes les épiceries, les snacks, les coins de rue et, jamais ô grand jamais, réfrigérée ! Il y en a des murs entiers chez Carrefour Market …
Quel succès commercial !
Mais 3 autres aliments, sans lui faire concurrence, occupent une place essentielle dans l’alimentation des Marocains : le thé et leurs fidèles compagnons, le sucre et la menthe Il existe des centaines de marques de thé et il faut être hyper pointu (ou Marocain) pour comprendre la différence existant entre elles hihi. Du coup, on préfère le boire directement servi dans un café !
N’oublions pas leurs délicieuses pâtisseries, sucrées, pleine de miel et assez grasses. Un vrai régal qui plaît non seulement aux humains, mais aussi aux … abeilles ! Pour des raisons que je voudrais connaître, il y a des essaims entiers dans chaque pâtisserie qui butinent les gâteaux. A quand un miel « toutes friandises » ?!
Manger partout et tout le temps …
Comme en Amérique latine, au Maroc, on trouve des commerces ouverts très tard et des snacks partout. Jamais de la vie tu te demandes « est-ce que ça va être ouvert ? » : ce le sera (sauf pendant le Ramadan, j’y reviendrai) ! Et en plus, tu n’as pas qu’un choix de kebabs ou de « tacos » (ce sandwich mêlant viande et frites assaisonnées de sauces industrielles et usurpant le nom de « tacos » à la gastronomie mexicaine sans lui rendre hommage) : en bas de chez moi, le snack cuisine tous les soirs des poulets rôtis, de la soupe harrira et des tajines pour des prix vraiment modiques.
Et c’est comme ça que tu peux grossir peinard …
Petite nuance, cependant, à mon enthousiasme premier : ne cherchez pas un couscous un autre jour que le vendredi car vous n’en trouverez pas, sauf à vous rendre dans un resto pour touristes ! (Pire, ne demandez pas un couscous merguez, malheureux ! C’est presque un crime de lèse-couscous au Maroc ! C’est comme demander à un Français d’adoucir un grand cru de vin rouge en y ajoutant du 7up ou du Fanta fraise pour le transformer en sangria 🤣).
Autre petit bémol : of course, les amateurs de viande de porc seront un peu frustrés, car on n’en trouve qu’avec parcimonie.
Et on, on boit quoi ?!
Perso, je vais toujours au plus simple : de l’eau en bouteille ou filtrée. Mais, sur la table des restos, on ne peut pas dire qu’elle soit très populaire, plutôt remplacée par des sodas.
Ai-je envie d’une petite bière ou d’une bouteille de vin ? Là, ça peut se compliquer car la plupart des établissements n’en proposent pas, sauf à se trouver dans un resto de gamme un peu plus chic et qui possède une autorisation pour en vendre. On y retrouve donc tous les Français pour qui manger sans alcool est impossible .
D’ailleurs, au quotidien, trouver une bouteille de vin nécessite de ruser un peu. Comme aux Etats-Unis ou dans certains pays du nord de l’Europe, il faut se rendre dans une boutique dédiée à la vente d’alcool. Ce qui est amusant, c’est qu’ici, elles sont généralement en sous-sol et tu y accèdes comme s’il s’agissait d’un club clandestin… Je ne comprends pas trop pourquoi car, contrairement aux US, personne ne te demande de justifier de ton âge, ni … d’un certificat de baptême pour prouver que tu n’es pas musulman hihi… D’ailleurs, il n’y a pas que des baptisés qui viennent se fournir ici, loin s’en faut … Dans tous les cas, nous ressortons tous de la boutique avec nos achats bien empaquetés, pour que nul ne devine ce que nous avons sous le bras… Et voilà … Ni vu, ni connu !
Les cafés
Cela étant dit, il me semble que les 2 boissons nationales sont autres.
Dégustées dans les innombrables cafés du pays, par des hommes seuls ou en groupe, fumant cigarettes sur cigarettes, le thé au sucre à la menthe et le café, remportent tous les suffrages.
J’imagine que les femmes en boivent aussi, mais elles doivent le faire chez elles, car dans l’espace public on les croise rarement assises à une terrasse. Parfois, certaines s’enhardissent à le faire quand elles sont en groupe ou accompagnées par leurs maris. Mais l’art du café reste masculin ! Tout comme celui de la cigarette : ça faisait des années, tous pays confondus, que nous n’avions pas vu fumer autant et partout …
Parlons un peu du Ramadan
Disons que c’est une période qui invalide momentanément tout ce que j’ai écrit jusqu’à présent…
Un jour, tous les commerces, les restos et les cafés sont ouverts, les gens vivent normalement, il y a de la gaité dans l’air… Le lendemain, rien n’est plus pareil !
En ce premier matin de Ramadan, nous ouvrons un œil apeuré. Une déflagration vient de retentir dans toute la ville. L’un de nous est formel : c’est sûrement une bouteille de gaz qui a dû exploser. Quelle horreur ! Et puis, le jour suivant, à l’aube, une nouvelle explosion nous fait sursauter ! C’est dingue ! Et puis, ça recommence à la tombée de la nuit… Mais que se passe-t-il donc ? A bien écouter, on dirait finalement des coups de canon. Pourtant, aucune invasion russe n’est relatée dans les journaux. Ce qu’il en ressort, en revanche, c’est la mise en avant d’une tradition marocaine qui consiste à tirer un coup de canon au lever du jour, pour marquer le début du jeûne, et un autre à la tombée de la nuit, pour signifier la rupture de celui-ci ! On n’aurait jamais pu le deviner tous seuls hihi
Quoi qu’il en soit, la vie s’est brusquement réorganisée : toute vente d’alcool est définitivement interdite (les revendeurs doivent fermer quelques jours avant et ne peuvent rouvrir que plusieurs jours après l’Aïd), les bureaux et les commerces ont modifié leurs horaires d’ouverture, tandis que les restos et les cafés sont – au pire – fermés, au mieux – ouverts seulement le soir. Pas très pratique à mon goût, mais j’apprends que cela est nécessaire car les gens se mettent à vivre beaucoup plus la nuit que le jour. Bueno … Je suis néanmoins contente d’observer cette coutume musulmane de près.
Pourtant, ce mois du jeûne m’étonne.
D’abord, car le comportement paisible des gens laisse désormais place à une nervosité palpable qui se remarque très bien chez les automobilistes : à peine sortis du boulot, ils démarrent leur voiture et sembleraient presque prêts à écraser n’importe qui les retarderait dans leur retour à la maison. Mais le plus incroyable a lieu à la rupture du jeûne : les rues se vident alors totalement – façon confinement covidien – et les quelques très rares automobilistes encore présents s’autorisent à griller tous les feux rouges. Trrrrès étrange …
Encore plus bizarre est l’abondance de nourriture présente dans les commerces. Je pensais – un peu stupidement, sûrement – que le mois du jeûne impliquait une espèce d’austérité spirituelle, comme le Carême chrétien, par exemple. Mais c’est en fait un peu le contraire. N’y voyez aucune critique car je n’y connais rien en religion musulmane et je me trompe probablement, mais on dirait que la nourriture devient brusquement la préoccupation centrale de beaucoup de gens. Les magasins sont achalandés comme chez nous à Noël, ils débordent de victuailles savoureuses qu’ils ne vendent pas ordinairement et les gens font la queue pour se les procurer. Le tout pendant un mois entier ! Du coup, j’avoue ne pas avoir très bien compris si le Ramadan invite à jeûner ou bien à manger davantage que le reste de l’année mais seulement la nuit …
Des mosquées et encore des mosquées …
Pour rester dans un registre religieux, parlons un peu des mosquées.
Au Maroc, et seulement au Maroc, elles sont interdites aux non musulmans. Il est donc impossible de les visiter et cela depuis le Protectorat Français. Sauf … une ! L’immense mosquée Hassan 2 de Casablanca !
Bien sûr, et sans surprise, il y en a partout ! Dans les villes, les villages, les hameaux … Mais aussi et parfois dans les hôtels, les aéroports et … sur les aires d’autoroute ! Ce qui est trompeur, c’est qu’elles offrent alors des salles d’ablution et nous, comme des novices, nous avons plusieurs fois failli les confondre avec les toilettes publiques hihi. On ne peut pas tout deviner …
Des profs voilées et des livres imprimés à l’envers
Le Maroc a réservé une double surprise à Carlito… Jugez-en plutôt.
Bien qu’il ne soit pas allé à l’école française depuis longtemps, les manuels scolaires français l’ont biberonné au principe de laïcité (lequel n’a ni cours en Colombie, ni au Maroc). Quelle n’a donc pas été sa surprise de constater que sa prof d’anglais à l’Institut américain était voilée, très très voilée … Sans souci ici, of course. Mais c’est une vraie différence culturelle à signaler.
S’il ne s’interroge désormais plus sur la tenue vestimentaire des unes et des autres (ayant une nouvelle fois pris conscience de la diversité des cultures qui existent dans le monde et de leur relativité), il continue quand même à bloquer sur un point : les bandes dessinées rédigées en langue française, mais éditées comme si elles étaient écrites en langue arabe. Pour le dire autrement, sur les livres qui se commencent par la fin, se lisent de droite à gauche et de bas en haut et dont on tourne les pages à l’envers. Honnêtement, c’est au moins aussi déconcertant à faire que d’écrire avec la main gauche pour un droitier hihi. Dans tous les cas, ça montre bien à quel point notre cerveau a du mal à sortir de ce qu’il connaît !
Mais, changeons de sujet …
Comment vexer un chauffeur de taxi …?
… en mettant ta ceinture de sécurité !
Au Maroc, il est assez mal vu de l’utiliser et donc de signifier implicitement à ton chauffeur qu’il conduit mal et que tu risques ta vie à ses côtés. Par conséquent, dans un taxi – et seulement dans ce cas, sinon tu risques une amende – fais comme si la ceinture n’avait jamais été inventée et confie plutôt ta vie à ta divinité préférée !
…Mais éviter de mourir quand tu es moniteur d’auto-école ?
En installant deux volants dans la voiture d’apprentissage !
Je n’ai jamais vu ça ailleurs et je serais très curieuse de savoir comment ça fonctionne quand les deux ne sont pas d’accord sur la direction à prendre !
Ou éviter de mourir tout court en voiture ?
Bon, soyons honnêtes, on dirait que les cours de conduite ne profitent pas à grand monde dans ce pays, quand on voit conduire la plupart…
Heureusement, il existe des radars par centaines et des flics absolument partout qui se réjouissent de t’arrêter à chaque instant et de te verbaliser pour la moindre infraction réelle ou imaginée… Ce sont sûrement les anges-gardiens de la route, sinon je ne vois pas à quoi ils serviraient hihi
Les piétons, une cible à abattre ?
C’est une question que l’on peut légitimement se poser chaque fois que l’on essaie de traverser une rue au Maroc… Hélas, il n’y a aucune culture du respect du piéton dans ce pays, avec toutes les conséquences dramatiques que cela entraîne.
C’est tellement insolite et inhabituel de laisser quelqu’un traverser que les automobilistes qui acceptent de le faire mettent leurs « warnings » pour le signaler à ceux de derrière afin qu’ils évitent de leur rentrer dedans …
J’avoue ne pas comprendre pourquoi les automobilistes sont incapables, au pire, de freiner quand un piéton s’engage sur un passage, au mieux, de s’arrêter pour le laisser passer. C’est juste honteux de penser que tu peux te faire renverser sans vergogne à chaque fois que tu traverses une rue et que tout le monde semble considérer ça comme normal.
Il y a beau avoir des policiers partout, je ne les ai quasiment jamais vus intervenir en faveur d’un piéton … Je plains vraiment les personnes âgées ou handicapées…
Pour moi, à ce jour, c’est dans un quotidien le gros point noir du Maroc. Quand je pense qu’ils veulent développer le tourisme (encore plus) en prévision de la Coupe du Monde de football 2030, ils devraient commencer par apprendre aux automobilistes et aux conducteurs de mobylette à être maîtres de leurs véhicules !
Les Marocains fans des Jeux Olympiques ?
J’étais fort intriguée par ceci :
Et je croisais ce genre de petit logo assez régulièrement en ville. Qu’est-ce que cela voulait bien dire ?
J’en ai conclu sans autre forme de réflexion que les marocains étaient tellement fans des Jeux Olympiques, qu’ils les célébraient à chaque coin de rue hihi…
… avant d’apprendre que le logo en question n’a rien de sportif ! Il symbolise … l’existence d’un bureau de tabac !!!
Pas facile à deviner, non ?!
Le tapis, objet d’un culte particulier ?
Parlons à présent d’un objet dont j’avais sous-estimé le potentiel problématique : le tapis.
Pour un Français, c’est un objet banal qui sert à décorer le sol. Il ne pose de problème que lorsqu’on se prend les pieds dedans et qu’on se casse la gueule.
Bêtement, nous pensions que c’était aussi le cas ici. Mais que nenni !
Me voici chez une amie, mes chaussures aux pieds, bien propres, qui ne posent a priori aucune difficulté à mes hôtes. Tout n’est qu’amabilité et savoir vivre. Soudain, me prend l’idée d’aller aux toilettes et donc de traverser le couloir qui m’en sépare en marchant (car je ne vole pas) sur son long et étroit tapis. Quelle folie ! Alors que je me dirige d’un pas assuré vers ma destination finale, une voix stridente s’élève : « aaaaarg ! on ne marche jamais sur un tapis avec ses chaussures !!! ». Punaise, ça a l’air sérieux ! Je me fige. La copine arrive : « au pire, si tu n’as pas le temps de les quitter, tu longes comme tu peux entre le mur et le tapis (10cms) ! » et se lance dans une démonstration de souplesse inouïe, adoptant son meilleur profil de hiéroglyphe pour me montrer comment procéder. Mais ce n’est pas niveau débutant : après deux tentatives, j’échoue misérablement et renonce à aller aux toilettes hihi.
Je pensais mon amie un peu maniaque, mais la scène a manqué de se renouveler plusieurs fois chez d’autres. Je dis bien « manqué » car j’avais gardé l’anecdote en tête et avais compris qu’il ne fallait pas marcher chaussée sur un tapis au Maroc. Il n’empêche ! Dès que tu t’approches à moins d’un mètre de l’un d’eux avec tes godasses, les gens se mettent à transpirer nerveusement, prêts à hurler « attention !!!! ». On dirait qu’ils vont défaillir, ce qui tend un peu l’atmosphère 😅. Mais que se passe-t-il donc dans leur tête à ce moment-là ?!
Je comprends bien qu’il est plus propre de marcher sur un tapis sans ses pompes, je comprends également que certains servent à se reposer dessus et, qu’enfin, il y a une symbolique liée à ceux qui servent à la prière … Mais pour les autres … Si quelqu’un peut m’éclairer sur cette quasi superstition ?!
De l’importance du salon …
Puisque l’on parle de tapis, évoquons à présent l’aménagement intérieur des logements. Là, pour nous, habitués aux agencements « à l’américaine » avec confort moderne, pièce centrale incluant la cuisine et distribution astucieuse des pièces, nous avons basculé dans une autre dimension.
Notre première expérience étrange, nous la faisons en août, à peine arrivés au Maroc. Nous visitons un appartement à louer qui nous plaît, à une exception près : la cuisine (dans laquelle on ne peut mettre qu’une petite une table) est enclavée à l’autre bout de l’appartement, très loin du salon/salle à manger. Devant nos mines sceptiques, l’agent immobilier nous explique : c’est parce que les hommes et les femmes ne doivent pas être en contact quand il y a des invités… Ah bueno …
Et là, nous nous rendons compte – et c’est intéressant – qu’on n’aménage pas les logements partout de la même façon dans le monde. Ils sont un reflet interne de l’organisation sociétale. Qu’on l’approuve ou non, c’est une autre histoire.
Nous comprenons alors qu’il va être difficile de trouver « dans l’ancien » des logements qui collent avec notre propre famille (dans les constructions modernes, il me semble que l’aménagement est plus « européanisé », surtout dans les Air BnB qui cherchent à coller à des standards plus internationaux).
Un des apparts dans lequel on a vécu cette année (2 mois) pour … l’équivalent de 1000 euros quand même …
Dans les maisons plus vastes, la surprise est ailleurs. Non seulement la cuisine est éloignée (mais cette fois car c’est le domaine de la bonne et de la cuisinière), mais le rez-de-chaussée n’est qu’une suite de vastes salons : celui des femmes, celui des hommes et un dernier, j’imagine, pour la famille quand elle n’est pas « en représentation ». Dans ces salons, tous les fastes sont permis et, reconnaissons-le, « ça en jette » ! On ne saurait dire, par contre, si le reste de la maison est au diapason ou si ce qui reste privé est beaucoup moins fastueux …
Quoi qu’il en soit, il en faut des meubles et des canapés pour remplir tout cet espace !
… Mais de l’utilisation spécifique des terrasses !
Pour un Français, le mot « terrasse » est un mot agréable, générant dans l’imaginaire collectif l’idée d’un petit coin extérieur à une maison ou à un appartement, antichambre d’un jardin ou substitut à celui-ci. La terrasse c’est un appel au farniente, à l’apéro, au soleil …
Bien sûr, quand tu débarques dans un pays « chaud », tu as forcément envie d’avoir une terrasse pour t’y asseoir et apprécier la douceur du climat. Tu te mets donc à chercher des appartements qui en possèdent une, mais … tu n’en trouves presque pas (en tout cas dans l’ancien). Enfin, pas au sens européen du terme. Au mieux, on te présente des biens possédant un minuscule balcon sur lequel une chaise ne tient pas, au pire ça n’existe pas. Comment cela est-il donc possible ?!
C’est en vivant un peu dans le pays que tu finis par piger le pourquoi du comment. Enfin, un peu. Ou je crois.
D’abord, il y a un risque de périr mort grillé sur ta terrasse quand le soleil frappe dessus. Nous l’avons appris à nos dépens en expérimentant celle-ci :
Sa superficie nous avait séduits, mais la réverbération du soleil dessus la rendait … inutilisable !! Et t’avais pas intérêt d’oublier ton linge dessus car il risquait de s’enflammer 😅
C’est la raison pour laquelle nous avons compris qu’au Maroc, il vaut mieux posséder de l’ombre plutôt qu’une terrasse.
En fait, quand elles existent, les terrasses sont situées sur les toit des immeubles et ce ne sont pas des roofs-tops pour apéro, mais … des sèche-linges ! C’est là où tout l’immeuble vient étendre ses draps, slips et chemises !
Et personne n’aurait l’idée de s’y faire bronzer 😅
Il me reste à vous parler d’une dernière chose …
… les toilettes !
C’est vrai que ça faisait longtemps que je n’avais pas abordé le sujet ! Pour ceux qui ne se souviennent pas de ceux des Etats-Unis ou de la Colombie, il y a toujours moyen de vous rattraper en cliquant sur les liens.
Le plus étonné, cette fois, a été mon Carlito qui, visitant des toilettes avec son père, n’a pas du tout compris le concept des WC à la turque que l’on trouve fréquemment dans les lieux publics ! Voyant un trou dans le sol, il cherchait désespérément où était la cuvette, sans se douter de la fonction dudit trou. Je crois que les explications ne l’ont que partiellement convaincu.
Quant à moi, pour tout vous avouer, c’est l’absence de papier toilette et la présence d’un robinet qui me laisse sceptique. Je veux dire, les gens, dans le concret, vous faites comment ?! Parce que pour de bon, je veux bien me nettoyer le derrière à grande eau, mais ça implique d’utiliser une main on est d’accord ?! Si tel est bien le cas, cette main se retrouve ensuite mouillée, comme le reste de mon anatomie ? Donc, sans papier, j’essuie le tout comment ???!!! Sur mon pantalon ? Ma chemise ? Les murs ? La très éventuelle serviette qui sert à tout le monde ?! Non… j’vois pas … ! Help !!!
Sur ce, je vous laisse méditer !
Quant à nous, nous avons passé un séjour mémorable dans ce beau et accueillant pays !
Coucou Valerie, j’espère que votre aventure au Maroc vous a permis d’appréhendé la question culturelle autrement de celle habituellement proposée en occident et en europe.
Très belle aventure.
Oui bien sûr
Formidable pays et habitants
Coucou Val,
Alors les hôtels où tu dois montrer ton certificat de mariage, j’avais déjà vu en Turquie; et ça doit exister dans pas mal de pays de la région, je pense…
Je pensais que les Allemands étaient plus sympas que les Français hi hi
Quant au gâteau spécial ramadan, avec noix, fruits confits et crème bizarre, il me donne une indigestion rien qu’à le regarder !!!
Mes autres impressions bientôt par téléphone
Gros bisous à tous les trois
Gros bisous ma biche !
Merci pour cet article, ça m’a fait plaisir de le lire étant marocaine installée depuis peu en France. Mais par contre, ce n’est pas marocain les mangas et ce n’est pas parce que c’est au Maroc qu’ils sont édités de droite à gauche haha. C’est le style japonais, ils lisent aussi de droite à gauche et ils sont aussi édités de la sorte en France ! Pour le reste, bonne analyse des différences culturelles 🙂
Merci pour ces précisions et votre gentil retour et … vive le Maroc !
pour le tapis ce n’est pas une superstition, c’est question de propreté. En fait, il n’y a qu’en France ou dans certains d’Europe où les gens entrent partout avec leurs chaussures.
En Asie il est normal d’enlever ses chaussures sur le palier.
Au Maroc aussi, mais avec les invités on fait des efforts pour ne pas les vexer donc on fait genre « pas de problème » quand les invités marchent partout avec leurs chaussures, mais le tapis c’est trop, on est obligé d’intervenir .
Car le sol on peut faire la serpillère après pour enlever les microbes, mais les gros tapis ça se lave rarement et à grandes eaux dehors, c’est beaucoup plus compliqué car ensuite faut le faire sécher etc.
A mon avis vous avez dû vous faire très mal voir en faisant ça !
Oui, sûrement ! Je ne l’ai plus refait. En même temps, on ne peut pas tout savoir …